Conférence du 3 février 2004 :
Le chanoine Bourgeat de Valfin-lès-Saint-Claude, géologue (1849-1926)
par Annie Reffay
Pour cette conférence commune avec l’Université Ouverte, la salle Bavoux-Lançon avait fait le plein : plus de 120 personnes étaient venues écouter Annie Reffay qui avait bien voulu répondre favorablement à une demande de présentation du chanoine Bourgeat, formulée par les Amis du Vieux Saint-Claude. En 1996, en effet, dans un questionnaire diffusé auprès de nos adhérents dont certains se souviennent peut-être, M. Danrez avait attiré notre attention sur ce personnage. Des contacts avaient alors été pris avec la famille qui conserve une riche documentation à son sujet ; une petite nièce, Odile Piton-Bourgeat, entreprenait de répertorier et de rassembler tous les écrits1 de « l’oncle chanoine » mais il manquait toujours un volontaire capable de mettre en valeur tout cela. Il fallut attendre que Mlle Reffay, géographe de formation, soit libérée de ses obligations professionnelles à l’Université de Limoges où elle enseignait, pour que ce projet se concrétise, avec l’aide de Robert Le Pennec pour les photographies et « le terrain ».
Le chanoine François Emilien Bourgeat, peut-être un peu oublié parmi les plus jeunes générations, est loin d’être un inconnu dans notre région et dans les milieux des sciences de la terre. Beaucoup en ont entendu parler et quelques-uns s’en souviennent personnellement : Mme Danrez, la centenaire de Valfin, a évoqué ce curé qui tapait sur les cailloux pendant les vacances et n’allait jamais à la messe au village – il s’était fait construire un petit oratoire aux Rivons, aujourd’hui en ruines ; M. Durandot avait été frappé, lui, par les chaussures pointues de l’ecclésiastique lors d’une tournée d’inspection au collège de la Maîtrise ! Où va se nicher la notoriété… Quant aux amateurs d’histoire locale, ils ont rencontré un jour ou l’autre son étude sur la trombe électrique ou cyclone de 1890.
Mais, s’il a rempli d’autres fonctions – alimentaires en quelque sorte - au cours de sa carrière dans les ordres, c’est comme géologue qu’il a acquis ses principaux titres de gloire et qu’il mérite de rester dans les mémoires. On pourrait penser que c’est la fréquentation du célèbre massif corallien de Valfin, affleurant au ravin de Sous la Côte, riche en fossiles, qui est à l’origine de son intérêt pour la géologie. En fait, comme nous l’apprenait A.Reffay, c’est tardivement, à l’âge de 30 ans, qu’il débuta dans cette science après des études et un début de carrière d’enseignant assez cahotiques. Ce n’est pas que notre compatriote manquât de qualités intellectuelles, bien au contraire. Mais sa naissance aux Prés-de-Valfin en 1849, dans un milieu modeste de paysans-chaufourniers, ne le destinait pas aux études. Remarqué par le curé de la paroisse, c’est tout naturellement que, après un passage au collège de la maîtrise de Saint-Claude, il se retrouva, sans réelle vocation religieuse, au petit séminaire de Nozeroy puis de Vaux-sur-Poligny et enfin, contre son gré, au grand séminaire : il aurait préféré préparer Polytechnique mais les moyens familiaux ne le lui auraient pas permis2.
Il poursuit alors des études en théologie,
sciences physiques et naturelles, à Lyon et à Grenoble, entrecoupées de périodes
d’enseignement. En 1879, il obtient un poste de professeur à l’université
catholique de Lille où il fera toute sa carrière, jusqu’à en devenir doyen ;
il y accueillera de nombreux élèves jurassiens, comme le jeune Burlet
pharmacien à St-Claude. Parallèlement, il entreprend une thèse de doctorat en
sciences naturelles sur les formations coralligènes du Jura, thèse qu’il
soutiendra avec succès le 1.12.1887. Pendant ses vacances, toujours passées
dans sa région natale, il va également lever la première carte géologique au
1/80.000e de la région de Saint-Claude, travail énorme
qu’il mène à bien grâce à ses qualités de marcheur. Il prend sa retraite
à Dole, tout en poursuivant ses travaux et en remplissant la fonction
d’inspecteur des écoles libres du diocèse. C’est là qu’il meurt en
1926, mais il est enterré à Valfin, où sa tombe existe toujours.
Après l’exposé très documenté d’Annie Reffay3, les nombreux
membres de la famille Bourgeat présents pour l’occasion se retrouvaient en
compagnie d’Amis du Vieux Saint-Claude autour d’un apéritif apprécié préparé
par la vice-présidente Suzanne Richard-Jacquemin, que nous remercions.
V. ROSSI
1
- La bibliographie complète du
chanoine Bourgeat, établie par O.Piton (150
références) est consultable en ligne sur le site de R. Le Pennec :
www.aricia.fr/jura-patrimoine/.
Le contenu de ses publications a été photocopié et déposé aux archives
municipales.
2
– Le chanoine Bourgeat a laissé des mémoires manuscrits très intéressants
où il raconte notamment son enfance aux Prés-de-Valfin ; la famille les a
fait éditer pour son propre usage mais il en reste quelques exemplaires,
disponibles au prix de 15 euros (+ frais de port éventuels : 2 euros –
paiement à l’ordre des Amis du Vieux St-Claude). S’adresser au siège.
3
- Le texte en sera publié dans le bulletin 2005 des Amis du Vieux Saint-Claude.